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Homélie : Jour de Pâques

Actes 10, 34… 43 – Psaume 117 (118) – 1 Corinthiens 5, 6b-8 – Jean 20, 1-9

Homélie du P. Michel Quesnel

Ce qui se produisit au tombeau de Jésus selon l’évangile de Jean, le matin du dimanche de Pâques, repose beaucoup sur le visuel : Marie-Madeleine voit que la pierre a été enlevée, et elle en déduit qu’il s’est passé quelque chose d’extraordinaire. Puis Pierre et Jean l’autre disciple arrivent à leur tour au tombeau. L’un et l’autre constatent que le cadavre de Jésus est absent et qu’il ne reste que les linges qui l’avaient enveloppé. A propos de l’autre disciple, l’évangéliste écrit : « Il vit et il crut. » On est encore dans le visuel.

Cela nous concerne, car ce sont des indices forts de la Résurrection. Mais cela nous concerne seulement indirectement, car nous n’avons pas vu de tels indices. L’évangéliste sait que ce sera le lot de la plupart des croyants, car il écrira plus loin, à propos de la rencontre entre Jésus et Thomas : « Heureux ceux qui croient sans avoir vu » (Jn 20, 19).

On a envie de compléter : « Heureux ceux qui croient, et qui vivent de ce en quoi ils croient. » Car, si nous nous contentons de croire et que cela ne change rien à notre façon de vivre, notre foi est vaine, totalement privée de consistance.

C’est bien ce dont est conscient l’apôtre Paul lorsqu’il écrit la 1ère épître aux Corinthiens. Alors qu’il a évangélisé la ville de Corinthe quelques années avant de rédiger cette lettre, il apprend qu’un membre de l’Eglise locale vit de façon parfaitement immorale. Et que les autres membres de ladite Eglise tolèrent parfaitement cela, car cet homme est sans doute un notable et que compter parmi les membres de la communauté est un honneur. Cet homme est croyant, mais ne tire aucune conséquence de sa foi. Les autres membres de l’Eglise locale le sont également, mais tolèrent l’intolérable.

Paul les invite à davantage de cohérence : lors de la fête de la Pâque, les juifs ne consomment pas de levain, car c’est un produit fermenté, qui a vieilli dans la putréfaction : il sert à faire lever le pain, mais il n’est en fait que de la pourriture. Dans la culture juive, il évoque tout ce qui fermente, « la haine, les non-dits, l’accumulation des griefs, la culpabilité, les chaînes que l’on s’impose sans pouvoir se libérer », comme le rappelait Élyette Abécassis, dans La Croix de mardi dernier.

Paul rappelle que les chrétiens n’ont pas à consommer de vieux ferments, mais à vivre de façon totalement nouvelle. Et il nomme deux aspects importants de cette nouveauté : la droiture et la vérité.

Nous ne partagerons jamais l’expérience de Marie-Madeleine, ni de Pierre ni de Jean. Nous croyons sans avoir vu. Nous sommes dans une situation analogue à celle des chrétiens de Corinthe, sans cesse tiraillés entre deux attitudes : d’une part une vie médiocre, compromise avec le mal, la négligence, la facilité, le goût des honneurs, ce que l’on peut regrouper sous le nom global de « péché ». Et d’autre part un appel à vivre de façon conforme à notre foi, notamment en droiture et en vérité. C’est plus exigeant, mais plus fécond.

Que la célébration de Pâques soit pour nous ne occasion de renouveler notre vie en suivant les conseils de l’apôtre Paul.

Comment vivre de façon plus droite ? Dans le Petit Robert, la droiture est définie ainsi : « Qualité d’une personne droite, loyale, dont la conduite est conforme aux lois de la morale, du devoir. » Si l’on interprète cette définition à la lumière des écrits de l’apôtre Paul, cela implique de vivre une charité active, en inventant pour nous-mêmes et pour les autres des comportements qui aideront les personnes humaines à grandir. Tout ce qui avilit, tout ce qui abaisse est à proscrire.

Comment vivre davantage dans la vérité ? Elle a trois dimensions : vérité envers Dieu, envers soi-même et envers les autres.

Nous sommes dans la vérité envers Dieu lorsque nous reconnaissons que nous avons tout reçu de lui, à commencer par la vie, mais aussi les biens matériels et spirituels. L’attitude première est alors l’action de grâce : « Rendez grâce au Seigneur : il est bon ! », chantions-nous dans le Psaume.

Nous sommes dans vérité envers nous-mêmes lorsque nous identifions nos qualités et avouons nos faiblesses. Cela suppose de la lucidité, y compris la reconnaissance de notre péché.

Nous sommes dans la vérité envers les autres, lorsque nous ne cherchons pas à nous faire valoir, lorsque nous reconnaissons également ce que nous leur devons.

Tout cela implique de nous renouveler, de ne pas nous contenter de nos pesanteurs. Lors de la Pâque juive, les Hébreux ont quitté le confort qu’ils connaissaient en Egypte pour aller vers la Terre promise en traversant le désert. Que la fête de Pâques nous stimule pour que nous nous mettions en marche et que nous cultivions en nous un supplément d’être. Notre monde désenchanté a besoin de témoins de l’espérance. Soyons de ceux-là.

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