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Homélie du dimanche 3 mars

Dimanche 3 mars 2024 – 3ème dimanche de Carême

Exode 20, 1… 17 ; Psaume 18a (19) ; 1 Corinthiens 1, 22-25 ; Jean 2, 13-25


Homélie de Michel Quesnel


Cet épisode évangélique que l’on appelle souvent Purification du temple, Jean l’anticipe au début de la mission de Jésus, alors que les autres évangélistes le situent au cours de la dernière semaine que Jésus passa à Jérusalem, quelques jours avant sa Passion. Jean veut montrer qu’une distance entre Jésus et les autorités juives exista dès que Jésus commença sa prédication.

Quels sont les motifs qui poussèrent Jésus à opérer un tel saccage dans un lieu sacré ? Les autorités juives de son temps, notamment les grands prêtres, considéraient que le monde romain était impur et qu’il n’avait pas à pénétrer dans le temple, le monument le plus sacré de la vie juive. L’argent romain était impur, les fidèles ne pouvaient pas l’utiliser dans l’enceinte du temple. Et, comme ils devaient acheter les animaux qu’ils offraient en sacrifice, ils devaient changer l’argent de l’occupant contre de la monnaie émise par les milieux sacerdotaux. D’où la présence de changeurs à l’entrée de l’esplanade sur laquelle le temple était construit.

L’intention était peut-être louable, mais elle avait entraîné de graves déviances. Le change était très désavantageux pour les fidèles, les milieux sacerdotaux s’enrichissaient de façon parfaitement scandaleuse en organisant ces tractations financières. Jésus s’en offusque et leur déclare : « Ne faites pas de la maison de mon Père une maison de commerce. » Et il ne se contente pas de dénoncer oralement la situation. Joignant le geste à la parole, il se fait un fouet, chasse tous ces commerçants véreux, et jette à terre les pièces d’argent accumulées sur les tables.

Que retenir pour nous d’un tel épisode ? Inévitablement, la vie religieuse comporte des aspects matériels, mais le risque est qu’ils prennent le pas sur l’essentiel de la démarche religieuse, à savoir le culte que les fidèles veulent rendre à Dieu pour l’honorer et s’ouvrir à son amour.

Le risque est constant. Chez les chrétiens, on a construit de belles églises ; on les a ornées d’objets d’art. Les officiants portent des vêtements de cérémonie pour célébrer. Est-ce cela l’essentiel de la religion ?

Pour les agnostiques et les pouvoirs publics, peut-être. Il n’y a qu’à voir l’émotion que produisit l’incendie de Notre-Dame de Paris dans le monde entier, et l’énergie déployée par les pouvoirs publics pour qu’elle puisse rouvrir ses portes le 8 décembre 2024. On ne va pas leur reprocher. Mais qu’est-ce qui est essentiel à Notre-Dame de Paris ? Est-ce la beauté de l’architecture, ou la grandeur de ce qui se passe à l’intérieur quand, au cours d’une célébration eucharistique, le prêtre consacre du pain et du vin pour qu’ils deviennent le corps et le sang du Christ et que les fidèles puissent communier ?

 

Certes, les monuments et les œuvres d’art qu’ils contiennent sont parfois superbes et méritent d’être bien entretenus. Je suis petit-fils d’architecte et très sensible à l’architecture, ce n’est pas moi qui dirai le contraire. Mais il y a un risque que le monumental, l’architectural, l’artistique, tout ce qui se voit, prenne le pas sur l’essentiel, qui est d’un tout autre ordre.

L’évangéliste Jean met bien cela en valeur dans les paroles qu’il prête à Jésus : « Détruisez ce sanctuaire, et en trois jours je le relèverai. » Les auditeurs n’y comprennent rien car ils connaissent le temps et l’énergie qui ont été nécessaires pour construire le temple de Jérusalem. Cependant Jean commente : « Mais lui parlait du sanctuaire de son corps. »

Là est bien la question. Où est le sanctuaire, pour un chrétien ? Est-ce le bâtiment et les œuvres d’art qu’il contient ? Est-ce les cierges qu’on brûle et pour lesquels on verse une offrande ? Ou est-ce le corps du Christ, à savoir le groupe humain assemblé, ainsi que le pain consacré que les fidèles consomment à la communion ?

Il y a là un correctif à apporter aux réactions spontanées que nous pouvons avoir et au regard que la société civile porte sur la religion chrétienne. Le christianisme véritable ne repose pas sur la beauté de ses bâtiments ou de ses œuvres d’art. C’est une religion du cœur, de l’amour de Dieu et de l’amour des frères humains, qui n’a pas d’existence matérielle et ne se voit pas.

Jésus, Fils de Dieu, est mort crucifié, comme le rappelle la 1ère épître aux Corinthiens. C’est un scandale pour les uns, une folie pour d’autres. Cela n’a rien de glorieux ni de beau. Mais là sont la vraie puissance et la vraie sagesse du Dieu biblique.

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