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Éditorial du Dimanche 16 novembre 2025

"Pas un cheveu de votre tête ne sera perdu"


Nous approchons de la fin de l’année liturgique mais le dimanche du Christ Roi de l’univers et de sa victoire finale est encore loin, et le chemin qui y conduit est semé d’embûches ! avouons-le : le programme envisagé par l’évangile de ce prochain dimanche n’est guère réjouissant : que de catastrophes et de malheurs en vue ! Mais aussi, cette très curieuse notation de Jésus : Il faut que cela arrive d’abord. Comment comprendre cette nécessité ? Sous l’effet d’une vieille morale doloriste qui n’envisage le réconfort qu’après l’effort, mieux encore, après l’épreuve, la formule semble ainsi ressortir d’un Dieu un brin sadique, qui n’interviendra finalement qu’après avoir bien laissé le monde à ses catastrophes généralisées.


Quelle nécessité en vérité à ce que cela arrive d’abord ? Dieu ne peut-il donc épargner l’histoire humaine ? Certes, l’affirmation de Jésus ne vise peut-être qu’une nécessité extérieure à lui, contingente à son dessein divin, simple constat prophétique dont il n’est en rien la source : l’exercice de votre liberté en fera passer le monde par-là, je le sais, je vous l’annonce, je le regrette… Interprétation rassurante, qui lave Dieu de tout soupçon, mais qui ne satisfait pas complètement. On pressent une autre nécessité, ni totalement factuelle ni mécaniquement chronologique. Il faut –mystérieusement- que cela arrive d’abord.


Car si Dieu ne veut pas le mal, il le permet. Entre soupçon de sadisme et insinuation de passivité, il faut donc lui faire confiance. Raïssa Maritain disait que Dieu sait ce qu’il permet.


Peut-être faut-il que tout le mal sorte, qu’il sorte d’abord, comme un mauvais bouton. Que le combat eschatologique aille à son terme, comme un abcès à laisser mûrir. Pas de doute qu’en bon médecin, Dieu assistera le malade jusqu’à rémission. Il lui tiendra la main, ne quittera pas son chevet. Il lui dira surtout qu’après ce d’abord, il y aura un après. Et que cela s’appelle l’espérance. Et surtout : cette très belle promesse : « Pas un cheveu de votre tête ne sera perdu ». Après l’inventaire des perspectives si peu engageantes auxquelles les disciples de Jésus sont promis, l’engagement divin est réconfortant. Loin de toute comptabilité exclusivement capillaire, l’expression est éloquente, clairement métaphorique, pour nous assurer de la justice ultime de Dieu. Le moment viendra où il vaincra nos adversaires et, tenant toute chose entre ses mains, ne laissera rien se perdre de nos vies.


Est-ce seulement une image, trop claire pour ne pas s’y arrêter ? « Pas un cheveu de votre tête ne sera perdu » N’est-ce pas davantage qu’une image ? Peut-être bien une confidence. Un aveu discret sur la façon dont Dieu veille littéralement sur nous. Comme si Dieu nous révélait là que sa sollicitude ne nous prend jamais en bloc, « grosso modo ». Il ne nous envisage pas de loin, pour aller vite. Tant de milliards d’hommes depuis la création du monde jusqu’à son dernier soir : on pourrait lui concéder une approche globale de chacun.


L’amour de Dieu descend et condescend jusqu’au moindre de nos cheveux. Dieu ne nous aime pas en gros, mais en détail. Quoi de plus ténu pourtant qu’un cheveu ! Quoi de plus infime. Mais Dieu est très méticuleux en amour. Ces petites choses de nos vies, celles mêmes qui ne pèsent guère plus qu’un cheveu, elles lui importent vraiment. « Pas un cheveu de votre tête ne sera perdu ». Oui, c’est au cheveu près que Dieu nous aime et qu’il veille sur nous !


Patrick Laudet, diacre

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