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Homélie du Mercredi 5 Mars 2025


Textes de la liturgie : Joël 2, 12-18 / 2 Corinthiens 5, 20-6, 2 / Matthieu 6, 1-6.16-18

 

« Au plus secret »

Tel est le paradoxe de notre rassemblement aujourd’hui. Nous venons ici et assumons – en général – le caractère public de venir en ce lieu célébrer notre entrée en Carême, alors que l’essentiel se passe « au plus secret », dans la relation personnelle de chacun avec Celui que nous appelons ensemble « Notre Père ».

Le Carême nous est offert comme un chemin de conversion : « Revenez au Seigneur votre Dieu ! » avons-nous entendu par le prophète Joël s’adressant au peuple d’Israël. « Revenez ? » ce qui veut dire qu’il nous faut opérer un déplacement intérieur pour vraiment parler de conversion. Personne n’a jamais vu le cheval d’où Paul serait tombé au jour de sa conversion, mais cela a permis à beaucoup d’artistes de souligner l’énorme déplacement intérieur vécu par Paul. Et ce n’est pas un changement de religion qu’il a vécu, mais une mutation dans l’idée toute faite qu’il avait de Dieu, et qui le fait tomber de haut. Sommes-nous prêts à tomber de haut ? On n’est jamais prêts, mais le plus des changements que nous avons à vivre est de nous retourner vers Dieu… qui s’est lui-même retourné vers nous.

L’invitation à faire cette démarche « dans le secret » est opposée à une démarche qui serait commandée à l’extérieur de nous-mêmes, par le regard des autres humains. Nous sommes invités à être libres, ce qui n’est pas facile. J’ai en tête avec sans doute un bon nombre d’entre vous ces images de vendredi dernier où un homme, le chef de l’état ukrainien a été soumis aux pressions, moqueries et chantages par d’autres hommes. Ce jour-là, j’ai vu en M. Volodymir Zelensky un homme libre, gardant au plus intime la fierté de son pays. Ainsi dans notre Carême, tout doit se jouer dans l’intime de notre liberté, de notre conscience. Je vous invite dans ce sens-là à écouter tout particulièrement l’Évangile de dimanche prochain où Jésus manifeste sa pleine liberté devant les tentations.

Mais cette convocation à l’intime n’est pas une privatisation , un encouragement à l’individualisme. Simplement, les gestes qui nous sont suggérés par l’Évangile de ce jour : l’aumône, la prière, le jeune, sont des gestes qui ne sont pas si naturels que ça – beaucoup n’éprouvent pas le besoin de les poser – et ils demandent une volonté engagée. Ces gestes ont leur source dans les profondeurs de notre être quand il se laisse rejoindre par Dieu. Ces gestes, aussi individuels qu’ils paraissent, sont en même temps des gestes de communion. Si je donne dans l’aumône, c’est pour tisser des liens avec autrui… Si je prie mon Seigneur, alors je tisse des liens avec tous ceux qu’il aime… Si je jeûne en me privant d’une chose ou d’autre que je trouve dans la société ou dans le cosmos, je prends part à ce qui nous relie tous dans notre humanité au cœur de la nature dont nous faisons ensemble partie.

Ainsi comme en chaque eucharistie, nous tissons des liens, à partir du plus intime de nous-mêmes, suivant en cela Jésus qui s’est donné à chacun, à chacune et à tous, ce que nous célèbrerons « dans le secret » et avec éclat au jour de Pâques.

 

P. Pierre Lathuilière

5 mars 2025

 
 
 

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