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Homélie du dimanche 29 décembre 2024


Dimanche 29 décembre 2024 – Fête de la Sainte-Famille


1 Samuel 1, 20… 28 ; Psaume 83 (84) ; 1 Jean 3,1… 24 ; Luc 2, 41-52

Homélie du P. Michel Quesnel


Les artistes du XIXe siècle qui ont représenté la Sainte-Famille sur des tableaux ou sur des vitraux n’ont sans doute jamais mis les pieds en Orient. Leurs œuvres montrent un enfant sage, tout seul entre Marie et Joseph, soit encore tout jeune soit en train de travailler avec saint Joseph dans son atelier de charpentier, sous le regard attendri de la Vierge Marie. Ces artistes ont tiré un parti excessif d’une remarque que Luc fait dans la page d’évangile qui vient d’être lue : « Il leur était soumis. »


On ne vivait pas du tout de cette façon à Nazareth, au Ier siècle de notre ère. Les maisons et les ateliers n’étaient fermées que la nuit et quand on s’absentait ; le reste du temps, les portes restaient ouvertes ; les gens allaient facilement les uns chez les autres. Quand une mère gardait son enfant, elle avait inévitablement d’autres enfants dans les pattes, à jouer, à parler, à se chamailler éventuellement. On était sans cesse dans le mouvement, et aucunement dans une famille rangée telle qu’il en exista dans la bourgeoisie urbaine du XIXe siècle.


La soumission de Jésus à Marie et à Joseph est en partie malmenée par la scène de l’évangile de Luc que nous venons de lire. Elle est rédigée avec des détails qui évoquent une résurrection. Jésus a douze ans, l’âge qu’avait la fille de Jaïre lorsque Jésus la fit revenir à la vie. C’est au bout de trois jours que Jésus est retrouvé par ses parents à Jérusalem. Et Jésus répond à sa mère qui lui fait des reproches : « Comment se fait-il que vous m’ayez cherché ? » Une phrase analogue sera prononcée par les deux hommes qui se tiennent dans le tombeau ouvert au matin de Pâques : « Pourquoi cherchez-vous le Vivant parmi les morts ? » (Lc 24,5).


La vie de Jésus et la résurrection déplacent bien des idées que nous pouvons avoir en tête. Certes, Jésus a certainement eu une conduite exemplaire vis-à-vis de Marie et de Joseph. Reste que Marie dit à l’adolescent de douze ans : « Vois comme ton père et moi nous avons souffert en te cherchant. » Et que Jésus lui répond : « Ne saviez-vous pas qu’il me faut être chez mon Père ? » Ce Père est un autre père que Joseph. C’est son Père du ciel.


Certes, les familles terrestres sont de belles réalités, et nous devons prier pour que nos familles vivent harmonieusement ; mais elles peuvent être aussi oppressantes, et elles ont besoin d’être complétées par des réalités plus fondamentales. Un peu plus loin dans l’évangile de Luc, alors que Jésus est parti en mission et que sa mère et ses frères viennent le chercher, il répond à la personne qui l’a prévenu : « Ma mère et mes frères sont ceux qui écoutent la parole de Dieu et la mettent en pratique » (Lc 8,21).

A propos du père, on peut lire ces paroles de Jésus dans l’évangile de Matthieu : « Ne donnez à personne sur terre le nom de père, car vous n’avez qu’un seul Père, celui qui est aux cieux » (Mt 23,8-9). Et l’apôtre Paul écrit dans l’épître aux Romains que Jésus est « le premier-né d’une multitude de frères » (Rm 8,29).


Ainsi, pour les chrétiens, la réalité familiale n’est pas limitée à la famille charnelle. Notre père terrestre doit laisser une place importante à Celui qui est notre Père de façon plus fondamentale ; notre père terrestre est aussi notre frère. Il en va de même pour notre mère terrestre, qui est aussi notre sœur, et pour nos frères et sœurs de sang qui ont à partager leur fraternité avec d’autres humains.


C’est de cette façon qu’il faut considérer la Saint-Famille de Nazareth. Elle s’incline devant des relations familiales plus fondamentales, celles qui unissent Jésus à son Père céleste.


C’est aussi de cette façon qu’il faut considérer nos familles. La relation fraternelle y est aussi importante que les relations de paternité, de maternité et de filiation. Lorsque des pénitents se confessent à moi, je rappelle volontiers à des mères qu’elles doivent se comporter comme des sœurs de leurs enfants lorsque ceux-ci sont devenus adultes, et qu’elles n’ont plus de responsabilité éducative. Et à des enfants devenus adultes, qu’ils n’ont plus à obéir à leurs parents. Les seuls commandements auxquels ils doivent obéissance sont les commandements du Père que nous avons pu entendre en écoutant la 1ère épître de Jean : « Mettre notre foi dans le nom de son Fils Jésus Christ, et nous aimer les uns les autres comme il nous l’a commandé. »


En cette fête de la Sainte-Famille, j’adresse tous mes vœux aux familles ici présentes pour qu’elles vivent harmonieusement, en tenant compte du fait qu’elles ne sont pas la seule famille à laquelle nous appartenons.

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