Homélie du dimanche 25 Mai 2025
- igignoux
- 27 mai
- 5 min de lecture
6° dimanche Pâques C : Evangile Jean 14, 23-29
Mes amis, chacune des lectures de ce dimanche oriente notre regard vers l’avenir : avenir des premières communautés chrétiennes dans le livre des Actes, avenir de l’humanité dans le livre de l’Apocalypse et enfin, dans l’évangile, avenir des disciples qui vivent leurs dernières heures avec le Christ.
L’avenir reste un sujet d’inquiétude pour bon nombre d’entre nous. Quels sont les parents ou les grands parents qui ne s’inquiètent pas pour le futur de leurs enfants ou petits-enfants ? De nombreux chrétiens sont aussi préoccupés par la situation de l’Eglise confrontée à de nombreux défis importants, comme la révolution anthropologique avec les débats autour de la fin de vie. Et pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, c’est même l’avenir de la planète qui est devenue une préoccupation majeure, au point que des jeunes affichent sur leur maillot ce slogan ou plutôt ce cri : « no futur ! ». Oui, vous ne me contredirez pas, si je vous dis qu’aujourd’hui notre monde est en panne d’espérance.
L’espérance, vous le savez, est avec la foi et l’amour, une des trois vertus théologales, en d’autres mots, une des trois colonnes qui soutiennent notre vie chrétienne et nous unissent à Dieu. En cette année sainte, le pape défunt François, a jugé bon de nous rappeler que nous devions tous être des « pèlerins d’espérance », capables d’affronter l’avenir et ses défis avec une confiance renouvelée.
L’espérance est souvent représentée par une ancre. L’ancre de l’espérance chrétienne n’est pas accrochée à un espoir futur ou hypothétique, à une action qu’il nous faudrait encore attendre… mais à un événement déjà passé. La barque de l’Eglise est ancrée dans la Résurrection du Christ. Dans l’événement de la mort et de la résurrection de Jésus, la vie a déjà gagné, le mal est déjà vaincu, la justice a définitivement condamnée l’injustice, la mort est morte !
Et cet événement passé peut, en nous, se rendre présent : « Si quelqu’un m’aime, dit Jésus dans l’évangile de ce dimanche, mon Père l’aimera, nous viendrons chez lui, nous irons demeurer auprès de lui… le Défenseur, l’Esprit-Saint, vous enseignera tout, il fera se souvenir de tout ». Autrement dit, ce même amour qui a relevé le Bien-aimé, ce même souffle de vie qui a ressuscité le crucifié accomplira en nous les mêmes œuvres que celles déjà accomplies en Jésus. Voilà l’espérance chrétienne, l’espérance qui ne déçoit pas.
Mais bien que la résurrection du Christ nous garantisse que notre espérance est solide, notre attente de la pleine réalisation de la Promesse ne peut jamais se vivre passivement. Impossible d’entrer dans cette espérance en restant les bras croisés. Elle nait en nous dans la mesure où, comme le dit Jésus, nous restons fidèles à sa Parole et où nous nous laissons inspirer par son souffle. Oui, l’espérance que fait naître en nous la résurrection de Jésus est mobilisatrice, elle nous remet debout. Elle est un moteur puissant qui nous incite à agir dans le souffle de l’évangile pour faire advenir jour après jour les prémices du Royaume. Elle garde notre cœur ouvert au murmure de l’Esprit, à son travail de résurrection en nous, car croire c’est accepter d’être habité par un élan de vie qui nous libère de nos peurs, de tout ce qui menace la foi, de tout ce qui nous rend insensible à la présence de Dieu en notre temps. Alors, « que votre cœur cesse de se troubler et de craindre. » nous dit le Ressuscité.
Aussi est-il bon de nous rappeler en cette veille de l’Ascension, que le départ de Jésus est l’annonce d’une nouvelle présence : « Je m’en vais, et je reviens vers vous. ». « Il disparaît à nos regards, dira saint Augustin, afin que nous rentrions dans notre coeur et que nous l’y trouvions. ». Oui, Jésus n’est plus là comme avant, mais il demeure en celui qui l’aime. Il n’est plus avec ses disciples, il est en eux, et désormais c’est l’Esprit Saint qui le rendra présent dans son Église. Il n’est pas là pour le remplacer, ni pour lui succéder, mais pour nous unir à lui. Pour que l’Église reçoive la vie du Ressuscité, et qu’elle soit toujours prête à rende compte de l’espérance qui l’habite.
Et on peut voir cette espérance déjà à l’œuvre dans la vie premières communautés chrétiennes. C’est ce qui nous est rapporté dans le récit tiré des Actes des Apôtres. Par fidélité au Christ ressuscité, au-delà de leurs craintes, de leurs peurs, du monde nouveau auquel ils sont confrontés, les apôtres vont faire preuve d’une audace étonnante : ils prennent une décision déterminante pour l’avenir et sur laquelle ils n’ont reçu aucune consigne de la part de Jésus. Ils décident de ne pas imposer la circoncision à ceux qui veulent devenir chrétiens. Or ils sont juifs, comme Jésus lui-même est juif. Et voilà que des païens se mettent à croire en Jésus. Que faire ? Faut-il imposer tous les préceptes de la Loi de Moïse à ceux qui viennent d’un autre univers culturel et religieux ? Non. L’Évangile est pour tous. L’Esprit Saint inspire aux apôtres une décision qui permettra à des Juifs et à des païens de s’unir dans une même foi et de former une même communauté de croyants. Voilà comment ils ont mis l’Église, sur un chemin absolument nouveau, un chemin d’avenir, en étant absolument fidèles à la Parole du Christ qui envoie son Église porter son Evangile dans des mondes encore inconnus. C’est ce qui a permis de proclamer son espérance en toutes langues et dans toutes les cultures. C’est ce qui nous vaut d’être aujourd’hui chrétiens.
Et particulièrement ici à Lyon, nous pouvons nous rappeler que la lumière de l’Évangile nous est arrivée dès le 2e siècle, par des hommes et des femmes venus d’orient. Ont-ils emprunté les voies navigables ? ou bien les voies romaines ? En tout cas ils sont partis au bout du monde, par fidélité à la parole du Ressuscité, poussés par le souffle de l’Esprit. Ici, au confluent du Rhône et de la Saône, ils ont planté l’Église du Christ. À nous donc désormais, de semer la parole et l’amour du Christ, au confluent des activités humaines, à nous de partir à la rencontre des désirs et des angoisses des hommes de notre temps, pour bâtir la cité de l’espérance. Cette cité, que voit déjà l’auteur de l’Apocalypse, une cité ouverte à tous les peuples, une cité dont le coeur n’est plus un temple de pierre mais le Christ ressuscité, présence vivante du Dieu d’amour.
Allez, belle fête de Pâques encore à vous tous, plongeons sans réserve dans le grand courant de vie du Ressuscité, et demandons au Seigneur l’aide de son Esprit-saint, notre défenseur, pour nous ouvrir pleinement à l’espérance qui ne déçoit pas. Et « même si notre cœur nous condamne », rappelons-nous que « Dieu est plus grand que notre cœur »,
Amen !
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