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Homélie du curé ukrainien lors de la messe pour l'Ukraine à la basilique le 9 mai 2023

« Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix ; ce n’est pas à la manière du monde que je vous la donne » (Jn 14,27...)

Il est évident, Chers Frères et Sœurs, qu'il n’est pas facile pour nous, les Ukrainiens, de comprendre ce sens profond de la paix de Dieu en cette période où nous avons du mal à mettre fin à la guerre.

Jésus a vécu à une époque où le peuple juif était sous le fardeau de l'occupation romaine. Pendant des siècles, il n'a pas connu de période de paix juste. Le peuple juif voulait tellement la liberté qu'il ne pouvait pas comprendre quelle sorte de paix et de victoire Jésus prêchait. Pour eux, la victoire n'était qu'une question de liberté et de justice. Mais le Christ envoie un autre message. La véritable paix commence sur la croix, et non pas en trouvant de moyens de se débarrasser des problèmes sociaux, politiques, matériels. La paix que Jésus apporte nous aide à faire face aux circonstances difficiles, à ne pas être brûlés par l'anxiété, la colère ou la peur. Elle apporte à nos cœurs une confiance tranquille qui nous guide lorsque nous sommes confrontés à des défis. C'est une paix qui ne dépend pas des événements de la journée, mais de l'amour illimité de Dieu. C'est une paix de la joie en présence de Dieu, même si nous traversons les moments d'anxiété.

« Que votre cœur ne soit pas bouleversé... Je reviens vers vous... Vous seriez dans la joie » (Jn 14,23...)

Si le Christ sur la croix, au milieu de souffrances inouïes, a pu lever les yeux vers le Père avec une espérance qui dissipe le désespoir, ayons aujourd’hui le courage de nous adresser au Sauveur ressuscité avec le Psalmiste: Car Il n’a ni méprisé ni dédaigné la détresse de l’affligé, et Il ne lui a pas caché sa face, mais Il l’a exaucé quand il criait vers Lui....La postérité le servira ; on parlera de l’Éternel à la génération qui vient ; on viendra annoncer Sa justice à un peuple qui n’est pas encore né, pour lui dire que l’Éternel l’a faite. (Ps 22, 24, 30–31).

Isaïe a décrit la naissance du Messie comme du Prince de la Paix. Tout au long de sa vie, Jésus a travaillé sans relâche pour éliminer les obstacles qui nous empêchent de connaître la paix de Dieu, d’établir la paix dans nos cœurs, de retrouver la paix avec nos proches. Sur la croix, le Seigneur dit que tout est achevé. La réconciliation de toutes choses se réalise dans la dimension pascale que nous vivons actuellement.

Chers Frères et Sœurs, nous avons également écouté le passage des Actes des apôtres (14, 19-28) sur le voyage que Paul et Barnabé ont effectué partant d’Antioche pour ensuite revenir à Antioche, et nous avons entendu tout ce qu'ils ont vécu.

L'apôtre Paul a été battu presque à mort, au point que tout le monde l'a cru mort. Il a été chassé de la ville, de la communauté. Mais ceux qui avaient confiance en lui et qui voulaient le soutenir, sont venus à lui, blessé et battu. Avec eux, il a repris connaissance et, par la puissance de Dieu, s'est relevé et retourné dans la ville pour continuer à témoigner courageusement de l'Évangile, à témoigner de Jésus ressuscité.

Quelques années plus tard, dans sa lettre aux Galates, Paul écrit : " Que personne ne vienne me tourmenter, car je porte dans mon corps les marques des souffrances de Jésus" (6:17). Certaines de ces plaies et cicatrices peuvent provenir de la bastonnade de Paul à Lystre, dont nous venons d'entendre la lecture. Les plaies peuvent durer un certain temps sur le corps, les cicatrices restent pour toujours. Les plaies de la guerre en Ukraine prendront des générations pour être guéries, les cicatrices resteront dans l'histoire à jamais. Le Seigneur ressuscité donne la paix à ses disciples au moment où il leur montre ses blessures. Les plaies sur le corps du Dieu ressuscité ne demeurent pas maintenant comme des endroits du mal, mais juste comme des signes, des souvenirs du mal et de la cruauté qui existent dans ce monde et qui nous blessent.

« Avance ta main, et mets-la dans mon côté : cesse d’être incrédule, sois croyant » (Jn 20:27). Celui qui a été crucifié et qui est mort est bien le même Seigneur qui est ressuscité. Lui, le Ressuscité, vainqueur de la mort, se fait reconnaître par les disciples de toutes les nations et de toutes les générations précisément à travers ses plaies.

Les plaies de la guerre nous poussent, nous Ukrainiens, à repenser profondément beaucoup de choses en cette période où les thèmes de la mort et de la vie sont si étroitement liés. Ces blessures nous encouragent à croire en la restauration et la résurrection. Ces plaies deviennent également notre mémoire commune, afin que cette horreur prenne fin le plus tôt possible et qu'elle ne se reproduise jamais.

Chers Frères et Sœurs, merci de participer à cette prière organisée aujourd'hui, merci de partager notre douleur... La douleur partagée nous ramène aux sens, et Dieu nous donne la force de nous relever sans cesse et de marcher vers la résurrection. Amen.


p. Volodymyr PENDZEI, curé de la paroisse Saint-Athanase de l'Église gréco-catholique ukrainienne à Villeurbanne

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